"Le rôle des élites africaines dans le développement de l’Afrique". Tel est le thème d’une conférence publique animée par le Pr Spero Stanislas Adotevi, le 28 janvier 2012 à Ouagadougou, dans le cadre du lancement officiel des activités de l’association Elites africaines. Avant tout propos, M. Adotevi a tenu à se positionner. Il se dit "ni de gauche ni de droite". Mais il ne faut pas non plus s’empresser de le placer au milieu. « Je ne suis pas, surtout pas du milieu. Ce que je dis, je le dis quand il faut le dire c’est tout », assure t-il. Il veut et doit parler aux jeunes générations, et c’est pourquoi il a répondu positivement à l’invitation de l’association Elites africaines pour animer cette conférence inaugurale. Philosophe béninois, M. Adotevi a occupé des postes politiques et administratifs au Bénin, dont ceux de ministre de l’Information et de la Culture. Il a contribué récemment à la rédaction d’un texte intitulé "L’avenir du futur africain", à un ouvrage collectif : "50 ans après, quelle indépendance pour l’Afrique ?" De par les fonctions qu’il a occupées dans son pays et dans les organisations internationales, M. Adotevi a suivi toutes les phases de l’histoire du développement en Afrique depuis une cinquantaine d’années. Il a en outre côtoyé et rencontré beaucoup de dirigeants qui ont joué un rôle dans ce processus depuis les années des indépendances. Le conférencier prévient aussi que la plupart de ces dirigean "n’étaient pas toutes fréquentables". Pour définir le terme "élite", le conférencier propose de choisir l’intelligence et la capacité de l’homme en lieu et place des bureaucraties d’Etat, de parti ou de religion. Ainsi, l’élite ne se définit pas par catégorie professionnelle et encore moins par des catégories politiques. L’élite représente la frange la plus lucide et la plus éclairée d’une population considérée. Cette élite peut être responsable et patriote ou irresponsable face à la mission historique qui est la sienne, d’éclairer le peuple et de l’entraîner à assumer souverainement son plein développement dans la dignité. Deux exemples montrent à quel point les élites des années 70-80 sont en grande partie responsables de la situation actuelle de l’Afrique. Le professeur Adotevi note que la plupart des constitutions actuelles des pays africains ont été écrites par des diplômés constitutionalistes nationaux. Et pourtant, ces textes ne sont que des "copier-coller" de la constitution française. Il est aussi revenu sur le cas du francs CFA dont les règles de fonctionnement ne profitent pas à l’Afrique. Elles comportent des contraintes énormes, dont la finalité est de maintenir les pays qui utilisent le CFA dans une dépendance économique et donc politique. Et le conférencier de se demander : "Pourquoi alors les présidents de la zone CFA tardent à sortir d’un train dont la locomotive-l’Euro- est elle même en panne" ? Pour Adotevi, chaque génération reçoit des aînés, un héritage qu’il lèguera à son tour à la suivante. L’attitude responsable voudrait donc que nous nous préoccupions de l’Afrique que nous voulons laisser à nos enfants. Pour parler du rôle des élites africaines dans le développement, le Pr. Spero Stanislas Adotevi a choisi de le faire, non pas sous la forme d’un savant traité ou d’une analyse glacée de la crise des politiques économiques africaines, mais avec des mots qui encouragent les élites, les poussent à la persévérance et installent chez celles qui les entendent, une certaine "confiance en soi". Le rôle actuel des élites n’est pas de se lamenter ni de se morfondre sur l’héritage de leurs aînés mais plutôt de savoir ce qu’il faut en faire. A écouter le Pr. M Adotevi, les élites montantes africaines mesurent la lourde responsabilité qui est la leur dans le devenir du continent noir. "Repenser notre avenir par nous-mêmes", voilà la fin du commencement selon le conférencier. C’est aussi l’ambition l’association Elites africaines et de son président W. Eric Bougouma pour qui, "les élites sont les hommes et les femmes de toutes conditions sociales de tous rangs qui veulent et qui peuvent apporter une contribution à la réflexion et à l’action, en vue de résoudre les nombreux problèmes auxquels le continent africain est confronté".
Tabyam Abdoul Salam OUEDRAOGO
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